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Planifier sa succession en Suisse : étapes, outils et pièges à éviter

Planifier sa succession ne se résume pas à rédiger un testament. Vous protégez vos proches, vous réduisez les conflits futurs et vous décidez vraiment du destin de votre patrimoine. En Suisse, le cadre légal (réserves héréditaires, quotité disponible, fiscalité cantonale) offre de la souplesse… à condition d’anticiper.

Cet article vous guide pas à pas : étapes clés pour démarrer, outils à connaître (testament, pacte successoral, contrat de mariage, mandat pour cause d’inaptitude), aspects légaux à vérifier, erreurs fréquentes à éviter et conséquences d’une absence de planification. Vous découvrez des cas concrets (couples mariés, concubins, familles recomposées, propriétaires immobiliers). Si vous êtes frontalier·ère Franco-suisse, vous verrez aussi pourquoi une coordination fine évite des coûts inutiles.

Pourquoi planifier sa succession dès maintenant ?

Planifier sa succession, c’est reprendre la main sur l’avenir de votre patrimoine et de votre famille. Sans décision formalisée, la loi s’applique par défaut ; elle ne reflète pas toujours vos souhaits, surtout en cas de concubinage, de famille recomposée ou d’actifs immobiliers importants.

Les risques de laisser la loi décider

  • Concubin non protégé : sans testament ou pacte, votre partenaire n’hérite pas légalement.

  • Familles recomposées : la répartition peut léser un enfant d’un premier lit ou forcer la vente d’un bien pour “dédommager” les autres héritiers.

  • Immobilier : sans dispositions (usufruit, droit d’habitation), le conjoint survivant peut se retrouver face à une pression de vente.

  • Entreprise, titres, comptes : un blocage de la succession peut paralyser l’activité, retarder des décisions et coûter cher.

  • Fiscalité cantonale : selon le canton et le lien de parenté, l’absence d’anticipation peut majorer l’impôt successoral pour certains proches.

Les moments déclencheurs pour planifier sa succession

  • Événements familiaux : mariage/partenariat enregistré, arrivée d’un enfant, divorce/séparation, décès d’un proche.

  • Patrimoine : achat/vente d’un bien, création/cession d’entreprise, réception d’un héritage ou d’un don, hausse sensible de votre épargne.

  • Mobilité : déménagement inter-cantonal, changement de domicile France/Suisse (cas des frontaliers), expatriation/retour.

  • Transitions de vie : départ à la retraite, problème de santé, besoin d’organiser la dépendance et la gouvernance familiale.

Les bénéfices concrets d’une planification précoce

Sur le plan juridique, vous protégez le conjoint ou partenaire, sécurisez le concubin, clarifiez les rôles (exécuteur testamentaire, tuteur des enfants mineurs) et faites respecter vos volontés. Sur le plan financier, vous optimisez abattements et fiscalité cantonale, évitez les ventes forcées et assurez la continuité de l’entreprise comme des revenus. Sur le plan humain, vous réduisez les tensions entre héritiers, facilitez le partage et donnez à vos proches une feuille de route claire lorsque les émotions sont fortes.

Ce que vous pouvez décider à l’avance

Vous pouvez organiser la répartition par testament ou pacte successoral en tenant compte des réserves héréditaires. Vous pouvez protéger le logement familial grâce à un usufruit ou un droit d’habitation au profit du conjoint ou partenaire. Vous pouvez définir la gouvernance en désignant un exécuteur testamentaire pour piloter les opérations et limiter les conflits. Vous pouvez anticiper la capacité/incapacité avec un mandat pour cause d’inaptitude et des directives anticipées afin de préciser qui décide et comment. Vous pouvez ajuster le cadre du couple via un contrat de mariage ou le régime matrimonial pour attribuer certains biens au survivant avant le partage. Enfin, vous pouvez harmoniser la prévoyance et les assurances en alignant les bénéficiaires (2ᵉ/3ᵉ pilier, assurance-vie) avec vos dispositions testamentaires.

Check-list express : est-ce le bon moment pour agir ?

  • Vous vivez en concubinage (avec ou sans enfant).

  • Vous avez des enfants de lits différents.

  • Vous possédez un bien immobilier ou une entreprise.

  • Vous changez de canton ou de pays (notamment France/Suisse).

  • Vos documents datent de plus de 3–5 ans ou votre situation a changé.

Prochaine étape : réaliser un audit successoral (situation familiale et patrimoniale, objectifs, scénarios de répartition), puis choisir les instruments adaptés et organiser le dépôt/partage des documents.

Adavia vous accompagne

1) Héritiers légaux et ordre de succession

Si vous ne laissez ni testament ni pacte successoral, la loi répartit votre patrimoine entre vos héritiers légaux : d’abord le conjoint ou partenaire enregistré et les descendants (enfants/petits-enfants). À défaut de descendants, la succession remonte vers les parents, puis les grands-parents et leurs lignées. L’ordre légal n’a pas été modifié par la réforme entrée en vigueur en 2023.

2) Réserve héréditaire et quotité disponible

La réforme a accru votre liberté de disposer : depuis 2023, la réserve des descendants est réduite à la moitié de leur part légale (au lieu de trois quarts auparavant) et les parents n’ont plus de réserve. La réserve du conjoint/partenaire enregistré reste à la moitié de sa part légale.

Exemple simple : avec un conjoint et deux enfants, la part légale est de ½ pour le conjoint et ½ pour les enfants ; la réserve protège ¼ pour le conjoint et ¼ pour les enfants (⅛ chacun), et la moitié de la succession demeure librement attribuable par testament ou pacte. Notez aussi que les avoirs de pilier 3a suivent un régime de bénéficiaires spécifique et ne font en principe pas partie de la masse successorale.

Le concubin ou la concubine n’hérite pas en vertu de la loi, même après de longues années de vie commune. Pour le protéger, il faut prévoir des dispositions (testament ou pacte) en respectant les réserves des héritiers protégés et en anticipant l’impact fiscal.

4) Fiscalité successorale : une compétence cantonale

L’impôt sur les successions relève des cantons : la plupart exonèrent le conjoint/partenaire enregistré, alors que la taxation peut être significative pour les concubins et, selon le canton, pour d’autres héritiers. À titre d’illustration, Vaud exonère le conjoint/partenaire et a relevé en 2025 le seuil d’exonération pour la ligne directe (descendants) ; au-delà, un impôt s’applique selon barèmes et liens de parenté. Vérifiez toujours les règles du canton concerné avant d’arrêter vos choix.

5) Ce que change (très concrètement) la réforme de 2023

Vous disposez désormais d’une quotité disponible plus large, utile pour renforcer la protection du conjoint/partenaire, d’un enfant vulnérable, d’un enfant du conjoint dans une famille recomposée… ou pour faciliter la transmission d’une entreprise sans ventes forcées. En pratique, cela se traduit par des marges de manœuvre plus grandes dans vos testaments/pactes, à condition d’articuler correctement régime matrimonial, clauses bénéficiaires (2ᵉ/3ᵉ pilier, assurances) et fiscalité cantonale.

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(réserves, quotité disponible, impact cantonal)

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Les outils pour façonner votre succession

Testament

Le testament fixe vos volontés : qui reçoit quoi, à quelles conditions, et qui pilote la succession. En Suisse, trois formes existent : olographe (entièrement écrit, daté et signé de votre main), public (devant notaire/officier public) et oral (réservé aux situations d’urgence, par ex. danger de mort). Le testament public convient lorsque la situation est complexe ; le testament olographe exige une rigueur formelle (date, signature, lisibilité). Vous pouvez aussi désigner un exécuteur testamentaire chargé d’administrer la succession et de conduire le partage.

Pacte successoral

Le pacte successoral est un contrat notarié conclu avec un ou plusieurs héritiers. Il offre une sécurité élevée, notamment dans les familles recomposées ou lorsque vous souhaitez garantir au conjoint survivant une marge de manœuvre plus large. Il permet aussi, dans certaines configurations, une renonciation à la réserve par des descendants majeurs, ce qui augmente la quotité disponible et facilite, par exemple, le maintien du logement au survivant.

Contrat de mariage et régime matrimonial

Régler d’abord le partage matrimonial (participation aux acquêts par défaut, ou communauté/séparation de biens par contrat) influence directement ce qui tombera ensuite dans la succession. Adapter le régime matrimonial via un contrat authentique peut mieux protéger le conjoint survivant avant même l’ouverture de la succession (attribution de certains biens, clarification des masses).

Usufruit ou droit d’habitation sur le logement

Pour éviter une vente forcée du domicile, vous pouvez prévoir un usufruit ou un droit d’habitation en faveur du conjoint/partenaire. Une pratique courante consiste à attribuer l’usufruit sur la part des enfants, ce qui permet au survivant de rester dans le logement tout en respectant les droits réservataires.

Mandat pour cause d’inaptitude et directives anticipées

Si, un jour, vous n’êtes plus capable de discernement, le mandat pour cause d’inaptitude (art. 360 ss CC) désigne la personne (ou l’institution) qui vous représentera : assistance personnelle, gestion du patrimoine, représentation juridique. Le mandat peut être olographe (manuscrit, daté, signé) ou authentique (notarié), et il prend effet après validation par l’autorité de protection (APEA). Il cesse si vous recouvrez votre capacité de discernement. Les directives anticipées complètent le dispositif sur le versant médical : datées et signées, elles guident les soignants et vos proches quant aux traitements souhaités et à la personne appelée à décider.

Exécuteur testamentaire

Désigner un exécuteur testamentaire (personne de confiance ou institution indépendante) fluidifie l’administration de la succession, sécurise les opérations (inventaire, conservation, paiement des dettes), prépare le partage et joue souvent un rôle de médiation entre héritiers — précieux lorsque le conjoint survivant se retrouve seul face à des démarches lourdes.

Alignez toujours ces outils avec vos bénéficiaires de 2ᵉ et 3ᵉ pilier et d’assurances, vos contrats matrimoniaux et vos objectifs fiscaux cantonaux. Un audit successoral permet de vérifier la cohérence d’ensemble avant signature.

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Étapes d’une planification réussie (la méthode qui fonctionne)

1) Faire l’audit patrimonial et familial

Commencez par cartographier votre situation : composition de la famille (mariage/partenariat, concubinage, enfants de lits différents), régime matrimonial, personnes à protéger en priorité, et objectifs (maintien du logement, pérennité d’une entreprise, équité entre enfants, legs à une association, etc.). Établissez un inventaire précis des actifs et des dettes : biens immobiliers, comptes bancaires, 2ᵉ pilier/LPP, 3ᵉ pilier, assurances vie, titres, parts d’entreprise, œuvres d’art, prêts familiaux. Pour les frontaliers, ajoutez la répartition des biens et revenus entre Suisse et France afin d’identifier les frictions juridiques et fiscales potentielles.

2) Chiffrer réserves et quotité disponible, puis simuler des scénarios

Calculez la part légale de chacun, la réserve héréditaire et la quotité disponible. Sur cette base, simulez 2–3 répartitions possibles (par exemple : protection maximale du conjoint/partenaire, équilibre strict entre enfants, maintien du logement sans vente forcée). Intégrez l’impact fiscal cantonal et, le cas échéant, l’effet d’une imposition en France pour certains bénéficiaires. L’objectif est d’obtenir des scénarios chiffrés, compréhensibles et comparables.

3) Choisir les instruments adaptés à votre cas

Traduisez le scénario retenu en outils juridiques : testament (olographe ou public) pour exprimer vos volontés, pacte successoral pour sécuriser des engagements réciproques (utile en famille recomposée), contrat de mariage/régime matrimonial pour protéger le conjoint survivant avant même l’ouverture de la succession, usufruit ou droit d’habitation pour le logement, mandat pour cause d’inaptitude et directives anticipées pour l’incapacité. Désignez un exécuteur testamentaire si la situation est sensible (patrimoine complexe, héritiers en conflit, entreprise).

4) Rédiger, vérifier la cohérence et formaliser

La rédaction et l’authentification (notaire/officier public) sécurisent vos documents. Vérifiez la cohérence d’ensemble : testament/pacte, régime matrimonial, bénéficiaires des produits de prévoyance (2ᵉ/3ᵉ pilier) et des assurances vie, clauses des contrats d’actionnaires ou de prêts, dispositions d’usufruit. Prévoyez, si nécessaire, des clauses spécifiques pour l’entreprise (droits de rachat, gouvernance transitoire). Pour les frontaliers, anticipez la reconnaissance et la traduction éventuelle des actes de part et d’autre de la frontière.

5) Organiser la logistique et l’accès aux informations

Décidez où conserver chaque document (dépôt notarial, coffre, coffre-fort numérique) et qui sait les trouver. Constituez un dossier pratique : liste des comptes et contrats, coordonnées des conseillers (notaire, exécuteur, courtier/prévoyance), inventaire des accès numériques (avec procédure de récupération), relevés immobiliers, attestations d’assurances, pièces d’identité essentielles. Ajoutez une lettre d’intention (non contraignante) qui explique vos choix pour réduire les tensions le moment venu.

6) Mettre à jour régulièrement

Programmez une revue tous les 3 à 5 ans et après tout événement majeur : mariage/partenariat, naissance, divorce/séparation, acquisition/vente d’un bien, changement de canton, mobilité France–Suisse, création/cession d’entreprise, évolution santé. À chaque mise à jour, refaites le point sur réserves/quotité, fiscalité cantonale, bénéficiaires de prévoyance et cohérence de l’ensemble.

7) Les livrables concrets à viser

À l’issue du processus, vous devez disposer d’un dossier successoral complet : acte(s) signé(s), tableau de répartition et de calcul des réserves, lettre d’intention, coordonnées et rôle des personnes clés (exécuteur, tuteur, mandataire), check-list d’accès aux comptes et assurances, plan de suivi (calendrier des révisions). C’est ce dossier qui donnera à vos proches un cap clair et évitera les mauvaises surprises.

Cas pratiques et stratégies (ce qui marche vraiment)

Couples mariés ou partenaires enregistrés

  • Profil : deux époux avec un appartement commun et une épargne, enfants communs.

  • Objectif : maintenir le niveau de vie du survivant et éviter une vente forcée.

  • Stratégie : ajustez d’abord le régime matrimonial (attribution accrue des acquêts au survivant) pour augmenter ce qui lui revient avant l’ouverture de la succession. Complétez par un testament qui attribue un usufruit sur la part des enfants ou un droit d’habitation sur le logement. Ajoutez un exécuteur testamentaire pour fluidifier les opérations et limiter les tensions.

Concubins (avec ou sans enfant)

  • Profil : couple non marié, parfois avec enfant(s), logement commun.

  • Objectif : protéger le partenaire non héritier légal.

  • Stratégie : prévoyez un testament (ou un pacte successoral lorsque c’est pertinent) pour gratifier le partenaire dans la limite des réserves des héritiers protégés. Sécurisez le logement grâce à un usufruit ou un droit d’habitation. Vérifiez l’impact fiscal cantonal pour les concubins et, si besoin, arbitrez entre legs au partenaire et legs en nue-propriété aux enfants. Alignez les bénéficiaires des contrats de prévoyance (2ᵉ/3ᵉ pilier) et des assurances.

Familles recomposées

  • Profil : conjoint survivant + enfants communs et enfants d’un premier lit.

  • Objectif : équilibrer protection du conjoint et équité entre enfants.

  • Stratégie : combinez régime matrimonial (attribution accrue), testament et, lorsque les enfants majeurs y consentent, pacte successoral avec renonciation à réserve pour donner plus de latitude au projet familial. Pour des biens spécifiques (résidence, entreprise), envisagez un usufruit au conjoint et une nue-propriété répartie entre tous les enfants. En présence de tensions prévisibles, désignez un exécuteur et précisez une lettre d’intention pour expliquer vos choix.

Propriétaires immobiliers

  • Profil : patrimoine concentré dans un bien résidentiel.

  • Objectif : éviter la vente forcée, répartir de façon soutenable.

  • Stratégie : préparez un plan usufruit/nue-propriété ou un droit d’habitation au profit du survivant. Prévoyez de la liquidité (épargne dédiée, assurance-décès) pour payer droits, frais et dettes sans devoir céder le bien. Si vous détenez plusieurs biens, attribuez-les par lots pour éviter les indivisions complexes.

Indépendants, dirigeants, détenteurs de titres

  • Profil : entreprise opérationnelle ou portefeuille de titres non liquides.

  • Objectif : continuité d’exploitation et répartition équitable.

  • Stratégie : formalisez des clauses de gouvernance transitoire (droits de vote, direction intérimaire) dans le testament et/ou les statuts. Identifiez les héritiers repreneurs et, si nécessaire, concentrez des parts chez eux tout en compensant les autres par des actifs liquides. Prévoyez un mandat pour cause d’inaptitude pour éviter la paralysie si vous perdez votre capacité de discernement.

Frontaliers franco-suisses

  • Profil : résidence d’un côté de la frontière, actifs ou héritiers de l’autre.

  • Objectif : réduire les frictions juridiques et fiscales.

  • Stratégie : coordonnez testament/pacte avec les règles du pays de résidence et la fiscalité du ou des cantons concernés. Vérifiez la taxation des partenaires non mariés et anticipez les formalités de part et d’autre. Lorsque le droit le permet, examinez l’option de loi applicable à la succession pour éviter une fragmentation des règles. Préparez un dossier bilingue (listes d’actifs, actes clés, coordonnées des études notariales) pour accélérer le règlement.

Pour chaque profil, mettez vos choix à l’épreuve avec deux scénarios chiffrés : “protection maximale du conjoint/partenaire” vs “équité stricte entre enfants”. Vous visualisez immédiatement les effets sur la réserve, la quotité disponible, la liquidité et l’occupation du logement.

Vous souhaitez tester vos propres scénarios (concubinage, famille recomposée, immobilier, actif pro) et obtenir des clauses adaptées ? Contactez-nous : nous cadrons votre stratégie.

Sans planification successorale, la loi décide à votre place. Votre concubin n’est pas protégé, le conjoint survivant peut manquer de marge de manœuvre, l’indivision bloque les décisions et la fiscalité cantonale peut alourdir la facture pour certains héritiers. Faute de liquidités, vous exposez vos proches à des ventes forcées (logement, titres), et en cas d’inaptitude, l’urgence se traite sans vos directives.

Vous voulez sécuriser vos proches et votre patrimoine avec des décisions claires et cohérentes ? Parlons-en : nous vous accompagnons pour structurer votre plan et coordonner sa formalisation avec votre notaire.

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